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Cher journal, je t'avais un peu délaissé ces derniers temps, mais je crois que le moment est venu de reprendre la mine (ça fait belle lurette que j'ai cessé de te carresser à la plume, je préfère le critérium).
Aujourd'hui, nous sommes le 20 juillet, date très importante pour moi (je suis en vacances depuis quelques heures) et pour le pays (en grève depuis sept mois jour pour jour)...
Au début, on a gueulé ; tu penses, plus un train, plus un métro ni même un bus en fonction à quelques jours de Noël, ça a fait du bruit...après, on s'est habitué. Pour moi, Noël, depuis que l'on m'a démontré l'inexistence du gros bonhomme en rouge, a perdu de son attrait ! Donc ne pas pouvoir prendre les transports en commun pendant cette période, autant dire que je n'en avais pas grand' chose à cirer. C'était plus une question de solidarité. Pas envers ces empêcheurs de réveilloner en rond, et pis quoi encore ? Mais plus pour ces parents isolés qui devaient recevoir leurs enfant pour les fêtes, ces grandes réunions de famille qui tombent à l'eau ou ces étudiants s'échappant de leurs cités scolaire pour retrouver leur famille le temps de la trève hivernale.
Les étudiants n'ont d'ailleurs pas été les derniers à réagir... Ils avaient tiré leur traditionel coup de semonce en novembre dernier, ils ont remis ça le 02 janvier, pour la reprise des cours, argumentant que tant que la SNCF et la RATP feraient grève, ils ne pourraient pas partir en vacances, et donc qu'il était hors de question de reprendre les cours puisqu'ils n'avaient pas eut de vacances, logique non ? Ils n'ont toujours pas repris les cours... A l'époque, ça avait bien fait marer les journalistes...quand ils travaillaient encore.
Effectivement, au 3ème mois de grève, ils se sont vus accusés de prendre le parti des usagers plutôt que de relater les faits. Jean Pierre Pernault a donc planté le JT de 13h en se déclarant officiellement en grève, alors qu'il allait présenter un fabuleux reportage sur les fabriquants de banderolles dans un petit villages des Deux-Sèvres. Aussitôt imité par PPDA et très vite par tous les journalistes de la presse écrite. Bref, ça fait 4 mois que l'on a plus aucune nouvelle dans le pays, même pas la météo ou les résultats du loto ! C'est te dire, cher journal, dans quelle misère nous sommes aujourd'hui...
Relativons tout de même. Les journalistes ayant vite été soutenus par leurs collègues animateurs tv, les managères de moins de cinquante ans ont commencé a boudé la tv, ce qui s'est vite resenti dans l'audiance. "Pas d'audiance, pas de paye" a maladroitement déclaré Hervé Bourges. Du coup, ça fait 3 mois qu'on n'a plus de tv, il y a des bon côtés dans la grève quand même...
Il y en a beaucoup de mauvais par contre. Par exemple, ça fait 5 mois que je n'ai plus mangé de poisson ! Il faut savoir qu'après le baril de pétrole à 200$, peu de marins pêcheurs ont pu suivre, il se sont immédiatement mis en grève pour protester contre le prix exorbitant en demandant à l'état un "petit" effort sur les taxes pétrolières. Notre président, François Fillon (N. Sarkozy est en grève depuis fin février) a été très ferme : "nous ne céderons pas"...les marins pêcheurs non plus !
Il n'y a guère que sur les côtes que subsistent quelques poissoneries, partout ailleurs elles ont fait faillite. Un temps, on a pu en acheter dans les grandes surfaces, mais les poissoniers, aidés par tous les autres petits commerçants les ont toutes mises à sac. De toute façon, elles battaient sérieusement de l'aile depuis que les routiers (touchés également pas le prix du brut) avaient cessé de les ravitailler.
Nous, on s'en sors pas trop mal, nous avons un jardin et les chats se reproduisent à une vitesse folle : nous ne manquons ni de viande ni de légumes ! Oh, il y a bien une de ces pouritures de citadins qui tente parfois de nous voler les fruits de nore dure lâbeur, une balle dans le crâne et l'incident est clos ! En plus c'est l'occasion de faire un beauf-bourguignon, les gamins adorent !
Bref, aujourd'hui, c'est les vacances ! Il était temps, j'en avais un peu marre du boulot, rester dehors à cramer des pneus depuis 2 mois (en mai, la metalurgie a rejoint le mouvement), c'est pas une vie... Cette année, nous partons au Der, à peine trois heures de route. Depuis qu'il n'y a plus d'essence, on roule tous en vélo. Aubert, le magasin de cycles, s'est déjà fait braquer 17 fois. Au bébut les voleurs prenaient l'argent, mais depuis la dévaluation de l'euro, ils jettent leur dévolu sur les pneus, dérailleurs et autres accessoires qui s'arrachent au marché noir.
Les forces de l'ordre ne font rien...en grève depuis le mois de mars ! Au début il y a eut un service minimum d'instauré, mais Fillon ayant déclaré qu'ils n'avaient pas la même pennibilité que les courageux fonctionnaires, il leur a refusé les gilets pare-balle qu'ils demandaient...
Bon, il est temps de te refermer, cher journal. Je reprendrai le fil de mon roman intime à la rentrée. Quoique le mot "rentrée" ne veuille plus rien dire, plus personne ne travaille...
